Par UJA de Paris, 16 November 2017

(AVANT TOUT PROCÈS)

Par Laurence Boyer

POURQUOI LA RTOA ?

  • Dans une société où le droit régresse et où le gouvernement démissionne de sa mission régalienne de justice et réclame de la déjudiciarisation, il appartient aux avocats de proposer des solutions de sécurisation juridique, afin de restaurer la confiance des citoyens dans l’aptitude de la société à résoudre leurs litiges en respectant leurs droits.
  • L’avocat est le premier acteur de l’accès à la justice, puisqu’il est le premier contact du justiciable en cas de litige.
  • Il est le seul professionnel à conjuguer confidentialité, secret professionnel, connaissance juridique, pragmatisme économique et humanité.
  • L’avocat est le garant d’un consentement éclairé, compris et donc accepté des parties
  • Les avocats sont donc les mieux placés pour rechercher de manière efficiente une solution transactionnelle en cas de litige, plus rapide et plus sécurisante que le procès, et ayant pour effet de restaurer la confiance nécessaire du justiciable (entreprise ou particulier)
  • En outre, la RTOA s’inscrit aujourd’hui parfaitement dans la cadre d’une « déjudiciarisation » et du développement modes alternatifs de règlement des litiges, souhaités par le gouvernement, puisque destinée à réduire les contentieux

LE MÉCANISME :

La Recherche Transactionnelle Obligatoire entre Avocats  (R.T.O.A.)
La R.T.O.A., proposée par l’UJA de Paris depuis septembre 2007, et adoptée au Congrès de la FNUJA en mai 2008, est un mode alternatif de règlement des litiges offrant une possibilité sécurisée de régler des litiges, dans l’intérêt du citoyen et de l’Avocat. Sorte de « filtre pré-judiciaire » renforcé, à mi chemin entre la médiation et le droit collaboratif, mais plus efficient, La R.T.O.A. consisterait à instituer de manière règlementaire, en matière civile, commerciale et sociale, pour les procédures au fond (hors pénal et hors procédures d’urgence) une Recherche Transactionnelle Obligatoire entre les avocats des parties, avant tout audiencement de litige, qui pourrait s’articuler de la manière suivante :
  • Soit dès la connaissance d’un litige et avant tout procès, obligation pour l’avocat d’adresser une lettre d’usage en RAR à la partie adverse (qui peut être couplée avec la traditionnelle mise en demeure le cas échéant) demandant à la partie de communiquer les coordonnées de son avocat sous 15 jours, en vue de lui transmettre une offre transactionnelle « confidentielle sous la foi du Palais » (OTC).
  • Soit à la suite d’une assignation (en cas d’absence de réponse à la lettre d’usage, ou en cas de nécessité procédurale (prescription, interruption de délais …)), qui est alors simplement enregistrée et mise au rôle d’attente d’audiencement
A noter donc que le processus n’est donc pas bloquant et n’empêche pas la saisine d’une juridiction. (libre accès à la justice)
  • L’avocat adverse prend donc contact (en réponse à la lettre d’usage ou par sa constitution) dans les 2 cas sous 15 jours
  • Dès lors, l’avocat du demandeur doit dans les 8 jours suivant cette prise de contact transmettre au confrère, offre transactionnelle écrite « confidentielle sous la foi du Palais » (OTC).
  • L’avocat adverse a dès lors 3 options :
i. Accepter l’OTC : l’accord est formalisé par un protocole transactionnel mettant fin au litige, et/ou un Acte sous signature juridique pour les matières exigeant un acte authentique (en droit de la famille et des personnes, baux commerciaux, etc...) ii. Elaborer et transmettre une contre-proposition écrite sérieuse – des négociations en vue d’une issue transactionnelle s’ouvrent iii. Option : Saisir le Service RTOA de l’Ordre compétent (règles ratione loci du NCPC) pour désignation d’un avocat conciliateur (pour les litiges complexes / affectifs nécessitant l’intervention d’un avocat tierce pour débloquer le conflit – réunion avec les parties et les avocats) ou d’un avocat aviseur (pour validation d’une analyse juridique partielle ou totale du litige). Ces avocats conciliateurs / aviseurs ne pourraient intervenir que dans les domaines pour lesquels ils détiennent un certificat de spécialisation et sur accréditation de leur Ordre (liste préétablie). La désignation serait faite par le service sauf accord des parties sur un même avocat. NB : Un simple refus de l’OTC du demandeur n’est donc pas possible afin d’encourager le recherche transactionnelle. 2 issues :
  • La recherche transactionnelle, avec ou sans recours du service RTOA de l’Ordre, aboutit et débouche sur un protocole transactionnel et/ou Acte sous signature juridique
  • C’est un échec : les avocats des parties signent un certificat de RTOA négative permettant à l’avocat du demandeur soit :
i. De délivrer une assignation avec audiencement, ii. Soit de faire audiencer son affaire pour les cas où l’assignation aura déjà été délivrée Cette phase de recherche transactionnelle serait limitée dans le temps à 3 mois (soit un délai qui s’insère parfaitement dans les délais actuels de comparution). Tous les délais sont augmentés de 2 mois pour les parties résidant à l’étranger En cas de poursuite de procédure, les avocats des parties ayant déjà opéré un travail d’analyse du litige devraient êtres aptes à conclure rapidement et cercler les points litigieux devant être tranchés par les juges. La résolution par les tribunaux des litiges non transigés devrait donc s’en trouver accélérée. Le caractère obligatoire de cette recherche, destiné à encourager les avocats dans cette voie, est assuré par l’impossibilité (irrecevabilité ?) de faire audiencer l’affaire sans produire le certificat de RTOA négative. L’institution de ce certificat devrait avoir pour corollaire, en cas d’entrave de l’autre avocat au bon déroulement de la RTOA (soit que l’avocat ne fasse aucun effort de recherche transactionnelle, soit qu’il refuse intentionnellement de signer le certificat pour empêcher la poursuite de la procédure), la possibilité d’un recours très rapide auprès des services RTOA des ordres sur plainte de l’avocat d’une des 2 parties – En ce dernier cas, le Bâtonnier de l’avocat défaillant, par délégation, aurait pouvoir de signer le certificat et de prendre, le cas échéant des sanctions disciplinaires à l’encontre de ce dernier. Le caractère obligatoire de la R.T.O.A. constitue la clé de voute du mécanisme. Historiquement, la culture de l’avocat français latin, par opposition à la culture anglo saxonne, est dans l’opposition, dans l’affectif et dans la contestation (en tout cas dans un premier temps…). Le droit anglo-saxon est historiquement très collaboratif, les avocats y ont une part contributive importante, alors que notre construction juridique est essentiellement législative. Les anglo-saxons eux-mêmes sont culturellement plus enclins à la solution pragmatique. Ces différences culturelles expliquent sans doute le succès du droit collaboratif aux USA, et posent la question de son adaptabilité en France. La R.T.O.A. comme le droit collaboratif viennent donc heurter notre culture. En l’absence de caractère obligatoire, il y a fort à parier que la majorité des avocats n’assureront pas la promotion d’un mode alternatif de règlement des litiges, avant de longues années. Or le succès d’un tel mécanisme pour la restauration de la confiance du justiciable nécessite l’application d’un mécanisme reconnu et massif. Pour ce faire dans un délai raisonnable le caractère obligatoire s’il peut paraître rebutant dans le principe, présente l’avantage d’une efficience immédiate.

LES MESURES ASSOCIÉES INDISPENSABLES :

  • Le ministère d’avocat obligatoire devant toute juridiction
C’est le corollaire du caractère obligatoire de la R.T.O.A., caractère obligatoire qui constitue le gage de sa réussite. En outre le ministère d’avocat obligatoire devant toute juridiction permettrait de prétendre à une justice performante exercée entre professionnels du droit et de rationaliser les contentieux.
  • L’acte sous signature juridique :
Catégorie d’acte à mi chemin entre l’acte solennel et l’acte sous seing privé, rédigé par les avocats, signé par les parties et les avocats, rendu exécutoire par la signature des 2 avocats. Dans le cadre de la R.T.O.A., le Protocole d’accord pourrait entrer dans cette nouvelle catégorie d’acte.
  • Une solution pour l’aide juridictionnelle
C’est le corollaire indispensable du ministère d’avocat obligatoire devant toutes les juridictions, afin d’assurer un accès égal pour tous à la justice, dans des conditions équitables pour l’Avocat. Etant précisé que la R.T.O.A., n’aurait pas d’effet multiplicateur puisqu’elle n’augmentera pas le nombre des litiges mais se contente de modifier le mode de solution. A l’inverse, toutes les affaires transigées éviteront les prises en charge des degrés supérieurs de juridiction. De plus, la réduction des dépenses liées à la limitation du recours judiciaire du fait de la R.T.O.A., ainsi que la recette provenant du paiement des timbres pour l’enregistrement des accords, pourrait être affectée partiellement au financement de l’AJ Des chèques R.T.O.A., pourraient être délivrés aux jeunes entreprises et aux PME par les CCI.

LES EFFETS DE LA R.T.O.A. :

  • Un désengorgement considérable des Tribunaux, par réduction des affaires portées ou maintenues devant eux
  • Une résolution rapide et éclairée des litiges et acceptée par les 2 parties, ayant pour effet de restaurer la confiance du justiciable, particulier ou entreprise, et d’assainir les relations économiques et humaines (plus de sentiment d’injustice, plus de provisions interminables pour les entreprises, des relations employeur / salarié moins conflictuelles)
  • La suppression des audiences de conciliation devant les CPH
  • L’essor économique de la profession d’avocat, source de recettes et d’emplois

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