Bienvenue, Monsieur le Garde des Sceaux, à la Rentrée du Barreau et à la fête de sa jeunesse.
Nécessaire, incontournable, attendu, mais rarement espéré, le discours de Rentrée du Bâtonnier s’ajoute chaque année à l’édifice jamais achevé de l’éloquence judiciaire.
Il est d’usage d’évoquer les projets achevés, les réformes en cours et les espérances que l’on place dans les temps à venir.
Je vais sacrifier à ce rite.
Mais ce discours, à mi-mandat, sera celui de la liberté d’évoquer les sujets sur lesquels le Barreau a travaillé durant ces derniers mois et d’aborder ceux dont il devra s’emparer pour que notre profession évolue dans l’intérêt de nos concitoyens, des entreprises de notre pays, et plus généralement, de notre système juridique et de notre droit.
I – D’ABORD LES RÉFORMES EN COURS
Que veut-on faire précisément ?
La réponse pour le Barreau de Paris est claire et simple :
Il faut une grande profession du droit.
Ou, plus exactement,
Une grande profession d’avocat qui s’inscrit dans notre tradition et qui portera demain, partout, les valeurs qui la fondent.
Une grande profession d’avocat implique qu’elle englobe l’ensemble de ceux qui consultent, conseillent et défendent, de ceux qui forgent le droit dans le respect d’une déontologie forte, dont les manquements sont sanctionnés disciplinairement.
La fusion avec les avoués.
La profession d’Avocat, après avoir fusionné avec les Avoués d’instance en 1971, va fusionner avec les Avoués à la Cour.
Les tarifs disparaissent, la fluidité et la simplicité s’installent dans l’intérêt des justiciables.
L’Avocat assistera son client en première instance, puis devant la Cour.
Le Barreau de Paris sera au rendez-vous pour accueillir, en son sein, 60 ou 70 nouveaux Avocats dont les compétences procédurales enrichiront son expertise.
Le Président Pellerin, que je salue, sait que je ferai avec mon conseil tout, notamment en me préoccupant du sort des salariés de la Chambre, pour que cette fusion réussisse.
Mais, après cette étape, la profession d’Avocat doit poursuivre sa croissance nécessaire à notre droit.
L'avocat en entreprise.
D’abord, vers les entreprises.
La profession d’Avocat réfléchit, depuis longtemps, sur son exercice au sein de l’entreprise.
Le Barreau de Paris s’est prononcé en sa faveur l’an dernier.
Barreau largement ouvert sur l’étranger, plus de 2000 avocats du Barreau de Paris sont membres d’un Barreau hors de nos frontières, sans doute nous avons, mieux que d’autres, conscience des réalités du monde qui nous entoure.
Dans les grands pays développés, Etats-Unis, Canada, Japon, ou accédant à ce statut, Brésil, pays dont je salue les représentants de la profession, et avec lesquels nous avons signé des accords de partenariat, les avocats, inscrits à un Barreau, exercent en entreprise.
En Europe, nos principaux partenaires économiques, Allemagne, Royaume-Uni, Italie, Espagne, Pays-Bas, Danemark, mais aussi Grèce, Irlande et Islande, connaissent l’exercice en entreprise de l’Avocat…
Or, voici que des voix représentant diverses sensibilités de notre profession se prononcent contre cette possibilité en France.
Alors que j’entends dire depuis si longtemps que l’Expert-Comptable a des facilités que nous n’avons pas, parce qu’il est fréquemment en entreprise, voilà qu’au moment où on nous propose d’y avoir un statut, nous refuserions cette possibilité.
Faudra t-il attendre que des Avocats de l’Union Européenne, établis en dehors de nos frontières, viennent exercer chez nous, pour nous indigner alors de cette « discrimination à rebours » qui frapperait les Avocats français ?
Cette grande profession d’avocat, que je souhaite, ne peut se priver de la richesse, de l’intelligence et de l’expertise de ceux qui exercent le droit au sein des entreprises.
Je le dis avec inquiétude, car nos amis belges ont fait le choix d’une profession distincte, avec un statut propre, celle de Juriste d’entreprise, qui bénéficie de la confidentialité des avis juridiques émis.
Et que j’ai lu dans la mission confiée à Michel Prada qu’il lui était demandé de réfléchir à cette possibilité, pour la France, de doter les juristes d’entreprises d’un privilège de confidentialité.
Voir côte à côte, mais distincts, les Avocats et les Juristes d’entreprise, ne permettra pas de promouvoir notre droit à l’étranger, car les efforts, au lieu d’être conjoints, seront faits séparément.
Nous disperserons nos énergies, et nous gaspillerons nos ressources, à faire valoir nos particularismes au lieu de voir tout ce qui nous rapproche et qui fait que nous sommes, en réalité, similaires.
Alors que le Barreau de Paris est favorable à cet exercice.
Alors qu’il était soutenu par d’autres que la profession d’Avocat était, en France, très majoritairement hostile à ce projet, le Conseil National des Barreaux vient de se déclarer exactement partagé sur cette question.
Je souhaite donc que le CNB reprenne ses travaux sur ce point, sauf à accepter que d’autres que les avocats ne viennent fixer le périmètre d’exercice de notre profession.
Je préfère choisir que subir.
Mais, nous ne pouvons nous arrêter là.
Les avocats aux conseils.
La France a désormais … 3 Cours Suprêmes.
Deux, la Cour de Cassation et le Conseil d’Etat, sont au sommet de leur ordre juridique, et transmettent à la troisième, les questions prioritaires de constitutionnalité.
Les Avocats aux Conseils ont un monopole devant les unes, tous plaident devant l’autre.
Depuis que ce système existe, le Conseil Constitutionnel s’est-il plaint de l’insuffisance des Avocats à la Cour ?
De leur impertinence ?
De leur bavardage ?
Jamais.
Tout au contraire, cette irrigation permet de nourrir le Conseil Constitutionnel de l’expérience de la réalité judiciaire.
Alors, je le dis avec sérénité,
Les Avocats et les Avocats aux Conseils doivent travailler ensemble pour envisager, avant vingt ans, délai habituel de nos grandes réformes (1971, 1991, 2011), de fusionner, dans l’intérêt des justiciables de notre pays.
Vainement, on m’opposera les techniques particulières de cassation.
Les 60 charges d’Avocats aux Conseils travaillent avec 400 Avocats au Barreau de Paris, qui sont leurs collaborateurs, et qui connaissent parfaitement la technique du pourvoi et du mémoire.
Vainement, on m’opposera le regard nouveau qu’apporteraient les Avocats aux Conseils alors qu’ils plaident - contre nous - devant les Tribunaux administratifs et les Cours administratives d’appel.
Quel nouveau regard ont-ils pour préparer leur mémoire devant le Conseil d’Etat lorsqu’ils ont suivi la procédure en première instance comme devant la Cour et que nous nous trouvons dessaisis ?
Enfin, pourquoi ignorer délibérément au Conseil d’Etat, sur les rôles et sur les décisions rendues, le nom des Avocats à la Cour qui assistent les parties lorsque le ministère d’Avocats aux Conseils n’est pas obligatoire ?
On voudrait nous ignorer, nous gommer, que l’on ne s’y prendrait pas autrement.
Ce n’est pas convenable.
Cela étant, qu’on ne s’y trompe pas.
Je ne soutiens pas que les 50 000 avocats de France pourront demain tous librement représenter les parties devant la Cour de Cassation et le Conseil d’Etat car je conçois la nécessité d’une expertise, d’une spécialité pour pouvoir assister les parties devant ces juridictions.
Mais l’accès aux juridictions supérieures doit être sanctionné par la seule obtention d’un diplôme qualifiant et non par l’achat d’une charge.
L’acte d’Avocat.
Cet instrument juridique nouveau va, - enfin - voir le jour.
L’Avocat est, déjà et évidemment, responsable des actes qu’il rédige pour le compte de ses clients, particuliers et entreprises.
Il va demain, signer ces actes, leur donnant une valeur supérieure à celle des actes sous seing privé.
Il évitera ainsi des contentieux, car les parties ne pourront plus prétendre n’avoir pas mesuré la portée de leurs engagements ou, pire, n’avoir rien compris.
Il aura bien sûr, aussi, vérifié la réalité de la capacité juridique des parties à la convention.
Mais surtout, demain, ces actes d’avocats vont circuler partout en France, en Europe et dans le monde.
Cette circulation d’actes estampillés va créer une « soft law », un droit de praticien, un droit d’usager, et ce droit souple sera nécessairement promoteur de notre droit français, trop souvent brocardé à l’étranger comme étant corseté par un corpus déterminé d’articles codifiés.
La communication électronique.
Chacun le sait, le Barreau de Paris a un système de communication électronique qui fonctionne et que la Chancellerie a approuvé.
Son coût dérisoire - quelques euros par an et par Avocat - est lié à l’expertise que nous avons développée et aux investissements réalisés depuis 15 ans.
D’ici au 31 décembre prochain, plus de 10.000 avocats au Barreau de Paris seront connectés électroniquement.
En fait, c’est la quasi-totalité du Barreau plaidant à Paris qui sera ainsi connectée.
Il y a bien longtemps que les Avocats communiquent entre eux par voie électronique, pour s’échanger contrats, mais aussi pièces et conclusions.
Il était naturel que les Avocats communiquent de même avec les juridictions.
Je sais que, de ci, de là, une inquiétude se manifeste de voir ainsi menacée la postulation.
Mais, là encore, il faut savoir la profession que l’on souhaite.
La territorialité de la postulation reflète une conception de l’Avocat qui ne voit en lui qu’un Avoué napoléonien de première instance.
Un Avocat n’est pas une guérite de péage sur l’autoroute des procédures.
Et que l’inquiétude ne gagne pas ceux qui croient qu’ils vont disparaître.
Il faudra toujours un correspondant pour suivre localement les procédures lorsqu’un dialogue avec les Magistrats s’avèrera nécessaire, à l’instar des Avocats au Tribunal de Commerce de Paris qui ont officiellement disparu depuis 40 ans et dont l’existence est aujourd’hui toujours prospère.
Sur les réformes de la garde à vue et de la procédure pénale, Jean-Yves Le Borgne vous a déjà dit nos préoccupations.
Je n’y reviendrai pas, sauf à demander que les réformes soient faites, dans l’intérêt des justiciables, avec une concertation aussi large que possible et une réflexion approfondie, toujours préférable à l’enthousiasme d’une d’annonce précipitée.
II – MAINTENANT LES PROBLEMATIQUES
Je voudrais ici évoquer les questions sur lesquelles j’ai été le plus interpellé.
L’accès à la profession des hommes et femmes politiques.
Que n’ai-je entendu ?
Tout homme ou toute femme politique, souhaitant utiliser son carnet d’adresse, et le rentabiliser en faisant je ne sais quelle opération de trafic d’influence, pouvait devenir Avocat au Barreau de Paris.
Les passe-droits étaient acquis.
Les délibérations secrètes.
Le contrôle inexistant.
Et lorsqu’un homme politique ne pouvait rejoindre notre profession, l’ostracisme qui le frappait était évidemment lié à son appartenance partisane.
Soyons sérieux.
L’accès à la profession d’Avocat est fixé par la loi.
Le Législateur a considéré qu’il était possible de devenir Avocat dès lors que les diplômes et l’expérience professionnels acquis lui semblaient équivaloir à ceux de la voie directe.
Si le Législateur souhaite émettre des incompatibilités, par exemple, devenir Avocat par équivalence lorsque l’on est Parlementaire, qu’il le décide.
Mais qu’il ne compte pas sur moi pour donner une interprétation restrictive, sinon contingente, voire individualisée, des textes existants.
J’ajoute que le Conseil de l’Ordre travaille dans la transparence.
42 membres composent le Conseil de l’Ordre de Paris, issus pour plusieurs de syndicats.
Croyez-vous qu’il soit possible, alors que les noms des candidats admis à la prestation de serment sont examinés chaque semaine, de faire les choses dans l’opacité ?
Enfin, le Conseil de l’Ordre n’est que le premier juge de l’admission.
Il travaille sous le contrôle de la Cour d’Appel et nul doute que le Parquet général frapperait de recours une décision lui paraissant erronée.
Ainsi, depuis le 1er janvier dernier, quelques hommes et femmes politiques ont rejoint le Barreau de Paris, ni plus, ni moins que les années précédentes.
Ils y sont Avocats comme les autres, soumis au contrôle ordinal, et nul doute que s’ils violaient les règles de notre profession, je serais saisi dans les plus courts délais.
Et, je le dis avec sérénité,
S’il s’avérait que l’un d’entre eux manque à nos règles, je le renverrais à s’expliquer devant nos formations disciplinaires, là encore, sous le contrôle de la Cour.
Enfin, ne nourrissons pas de fantasmes sur l’importance de cet accès parallèle.
Il y a moins de 80 hommes et femmes politiques au sein des 23.000 Avocats du Barreau de Paris et beaucoup d’entre eux exerçaient effectivement notre profession avant d’embrasser une activité publique.
Le phénomène est donc particulièrement limité, même si la notoriété de certains de mes confrères a pu laisser penser qu’il était d’une autre ampleur.
L’affaire Bettencourt.
Ce qui s’est passé dans le dossier Bettencourt m’a également valu d’être fréquemment interpellé.
Je ne dirai, bien sûr, pas publiquement ce que j’ai fait dans le cadre des pouvoirs que la loi et les règlements me reconnaissent et qui est couvert par le secret professionnel.
En revanche, il est inconvenant qu’on me soupçonne de paralysie disciplinaire au motif que le vice Bâtonnier est le conseil d’Eric Woerth et que mon confrère Antoine Beauquier, Membre du Conseil de l’Ordre, coordinateur de l’autorité de poursuite, le conseil de son épouse.
Une fois l’anathème jeté, on a été bien en peine de m’expliquer ce que j’aurais dû faire et que je n’avais pas fait.
Ceci dit, trois remarques générales sur ce que cette affaire m’inspire.
D’abord, la très grande difficulté des Avocats qui doivent être loyaux, alors que la jurisprudence de la Chambre criminelle de la Cour de Cassation considère, comme preuve admissible, les enregistrements effectués à l’insu de ceux qu’on écoute dès lors qu’ils sont discutés contradictoirement.
La boîte de Pandore est ouverte.
Il faut aujourd’hui la refermer, en jugeant qu’une preuve obtenue par fraude est judiciairement inacceptable.
Si le juge cesse d’ignorer la fourberie, les justiciables seront moins tentés de la commettre.
Ensuite,
La complexité infernale des règles du secret professionnel.
La loi ne protège pas le secret comme une valeur objective.
Elle se borne à interdire à celui qui en est professionnellement le réceptacle, de le divulguer.
Comment un Avocat ou un Notaire peuvent-ils imaginer qu’un juge puisse admettre que soit diffusé l’enregistrement effectué à leur insu lorsqu’ils parlent des affaires de leur cliente à son domicile, avec le mandataire de celle-ci ?
Il faut donc, une nouvelle fois, remettre sur la table de travail la question de la protection du secret professionnel et le protéger intrinsèquement, en sus de l’interdiction légitimement faite à celui qui en est dépositaire, de le divulguer.
Enfin, les propos lâchés à la presse sont devenus un élément de la stratégie judiciaire.
Certains avocats croient opportun de tenir des propos qui ne correspondent pas à ce qu’imposent les règles de délicatesse et de confraternité.
On me dit aussi qu’ils s’égarent à des propos peu amènes sur les Magistrats.
Ce n’est pas ma conception des choses.
De tels excès font peut-être vendre du papier journal et grimper l’audimat, mais j’aime à dire, dans cette enceinte, que ces méthodes ne sont à la gloire ni de notre justice, ni de notre profession.
Face à ces comportements, j’ai exercé, dans la discrétion, l’ensemble de mes prérogatives.
J’ai eu, jusqu’à aujourd’hui, le souci que mon rôle régulateur ne fasse pas apparaître la déontologie comme le moyen de museler un avocat.
Désormais, je donnerai une suite disciplinaire à toute nouvelle incartade, quelle que soit la notoriété des Avocats de la cause.
III – MES INQUIÉTUDES
Comme tout Bâtonnier, j’ai beaucoup d’inquiétudes.
Je voudrais vous en faire partager deux.
La première concerne l’accès au droit.
Je ne reviendrai pas sur ce qu’ont dit, depuis 30 ans, les plus éminents responsables de notre profession sur la dotation insuffisante du budget de l’Etat quant à l’aide juridictionnelle.
300 millions d’euros quand l’Angleterre y consacre 2 milliards pour 10 millions de justiciables de moins, on ne peut que lever les yeux au ciel car en bas, nous ne sommes pas entendus.
Si gouverner c’est choisir, le temps est venu pour Bercy, dont j’avais dit, en prenant mes fonctions, qu’il était aussi le Ministère des Avocats, de décider où faire des économies, et où dépenser l’argent de l’impôt.
Je le dis avec d’autant plus de force que le Parlement a voté, hier, le paiement par le justiciable démuni, relevant de l’aide juridictionnelle, du droit de plaidoirie que l’Etat assumait jusqu’alors.
J’aimerais avoir la plume de Victor Hugo, car je vois les larmes de Gavroche dans les yeux de ce mineur, victime et partie civile, auquel le législateur nous suggère de demander 8,84 euros avant de plaider pour lui…
Ce ticket modérateur, qui ne dit pas son nom, sera la plupart du temps irrécouvrable et sera supporté par les avocats qui se dévouent pour les plus pauvres.
Est-ce, Monsieur le Ministre, une manière socialement juste d’organiser les économies de l’Etat ?
Je ne reviendrai pas plus sur ce que j’ai dit depuis de nombreux mois sur la nécessité de permettre aux classes moyennes un accès simplifié au conseil juridique pour les questions de tous les jours, loyer, famille, travail, consommation.
J’ai été très poliment écouté,
A ce jour, je n’ai pas été entendu.
Or, on ne peut refuser de prendre ce problème à bras le corps et d’y apporter une solution.
Ne détournons pas le regard.
Il faut, soit créer une assurance de protection juridique universelle obligatoire, soit rendre les honoraires d’avocat fiscalement déductibles en tant que service rendu à la personne.
Le droit au droit est une nécessité comme hier le droit à l’éducation ou le droit à la santé.
Sur ce point, mon combat ne cessera jamais.
Ma seconde inquiétude concerne la place de Paris.
Je suis très préoccupé par la diminution sensible de notre influence.
Savez-vous qu’au sein du CCBE, la langue française pourrait être abandonnée alors qu’elle est la langue, depuis 1951, des délibérés de la Cour de Justice de l’Union européenne.
Savez-vous qu’au sein de l’UIA, fondée par les Barreaux de Paris et de Bruxelles, la même revendication se fait jour ?
Et savez-vous que la Cour Internationale d’Arbitrage de la CCI pourrait quitter Paris ?
Paris est la première place mondiale de l’arbitrage mais Genève et Vienne font des offres alléchantes à la CCI qui envisagerait de déménager …
Je vous en conjure, Monsieur le Ministre, déployez tous vos efforts, y compris budgétaires si besoin, pour conserver à Paris sa situation prééminente.
Car, ne nous y trompons pas, la perte de cette situation privilégiée se paiera en terme de perte d’emploi, de perte d’activité et de perte d’influence.
On ne revient jamais sur ce qui a disparu.
IV – CONCLUSION : QUEL FUTUR ?
J’en ai terminé.
J’aurais pu aborder tant d’autres sujets que je suis confondu devant ce que je n’évoque pas.
Ne croyez pas que je ne suis pas concerné par le projet de déménagement du Tribunal aux Batignolles, ni que j’ai abandonné l’idée d’une Maison des Avocats de France regroupant les institutions de la profession.
Je suis simplement atterré par les taxes que la ville de Paris prétend obtenir du barreau pour lui donner le seul droit de construire
Je n’oublie pas l’Ecole de Formation des avocats du ressort de la Cour de Paris qui s’installe à Issy les Moulineaux et je remercie encore le maire de cette ville, André Santini, et son conseil municipal des conditions dans lesquelles il nous accueille.
Vous pouvez admirer à l’extérieur la maquette de cette école qui sera construite par Jean-Michel Wilmotte.
Je vois toujours avec intérêt les perspectives d’interprofessionnalité d’abord, avec les Experts-comptables, en me réjouissant de l’accord trouvé avec le Président Zorgniotti dans l’intérêt de nos deux professions, ensuite, avec les Conseils en Propriété Industrielle.
L’ interprofessionnalité n’est pas la fusion ou le double exercice.
Elle permet à chacun d’exprimer ses talents sans vouloir se faire le clone de l’autre.
Simplement, le temps de ce discours ne suffit pas.
Deux dernières choses toutefois, tant elles sont importantes pour notre profession et pour notre pays.
Je ne serai pas taisant, dans les temps à venir, sur la réforme de la gouvernance de notre profession.
Le Conseil National des Barreaux a 20 ans.
Il a été un fédérateur des Barreaux et a permis l’éclosion d’une déontologie unifiée dans notre pays.
Il regroupe, en son sein, toutes les composantes de la profession.
Mais qui ne voit la difficulté qu’il a à diriger, les délais qui sont les siens, ses hésitations, ses tergiversations…
Il faut une instance forte au niveau national.
Sur ce point, le Barreau de Paris fera, l’an prochain, des propositions pour fédérer les talents, les moyens et les énergies.
Et il occupera toute sa place au sein du Conseil National des Barreaux pour exprimer ses préoccupations et faire part de ses positions.
En tout dernier lieu,
Comment ne pas regarder de manière prospective notre organisation judiciaire.
Est-il raisonnable, aujourd’hui, d’avoir deux ordres de juridictions, trois Cours Suprêmes, et j’oublie le Tribunal des conflits.
Vous avez compris mon propos.
Je rêve tout haut et je souhaite qu’une réflexion soit menée pour que les deux ordres de juridictions se rapprochent afin de fusionner à terme et qu’il n’y ait, au sommet de cette institution juridictionnelle unifiée, qu’une seule Cour Suprême.
Nous y gagnerons en lisibilité, en simplicité et en compétitivité.
Je le souhaite, car je veux croire à l’union des talents au sein d’une seule justice,
Une justice forte,
Une justice exemplaire,
La justice que mérite la France.
Jean Castelain
Bâtonnier de Paris