LUJA Octobre 2023
Lire le rapportPourquoi s’engager bénévolement dans la vie institutionnelle de notre profession ? Julien Brochot, ancien membre du Conseil de l’Ordre, nous apporte son regard sur la question.
S’il y a bien une question qui m’a été posée à de nombreuses reprises pendant mes trois ans de mandat au Conseil de l’Ordre, c’est celle de savoir pourquoi moi, et d’autres, nous nous étions engagés au service des consœurs et confrères au sein de nos institutions professionnelles.
En sous texte, il faut bien comprendre que cette question en induit plusieurs autres : Pourquoi se livrer à une activité chronophage et bénévole ? Pourquoi le faire dans des Ordres ou Assemblées parfois perçus comme trop éloignés des avocates et avocats ? Pourquoi dépenser de l’énergie alors que les pouvoirs publics décident sans nous, en prenant tout au plus la peine de nous consulter pour la forme ?
Avant de répondre plus précisément, je crois qu’il convient de rappeler une chose élémentaire : nous sommes toutes et tous engagés.
Se lancer dans des études : engagement. Emprunter une voie professionnelle : engagement. Décider de vivre à deux : engagement. Encore. Chaque jour, à plus ou moindre grande échelle, nous nous engageons. C’est encore plus vrai pour les avocates et avocats. Lorsque nous conseillons, défendons, entreprenons, nous mettons beaucoup de nous-mêmes au service des autres. Est-ce à dire que la profession nous prédispose à l’engagement ? Possiblement. A ce titre, on notera qu’à l’Assemblée nationale, la profession d’avocat est la deuxième la plus représentée dans l’hémicycle.
La hasard des rencontres permet souvent de faire le petit pas supplémentaire vers un engagement plus soutenu au soutien des intérêts de la profession. Celles et ceux qui sont passés par l’UJA le savant : un passage par la Revue, une difficulté professionnelle, une soirée, une formation attisent la curiosité pour nos institutions professionnelles et ouvrent souvent la voie à un cheminement intellectuel vers un engagement plus ou moins soutenu.
La confrontation progressive aux problématiques de la profession créé l’envie de contribuer individuellement et collectivement à la mise en place de solutions rationnelles au bénéfice de toutes et tous.C’est très logiquement que certains d’entre nous souhaitent alors porter ces contributions au sein des institutions professionnelles pour leur donner une réelle portée. Bien sûr, cet enthousiasme se heurte parfois à la complexité du processus de décision, au faible engouement reçu par certaines mesures, à une certaine défiance vis-à-vis des institutions.
Ces obstacles justifient de plus fort un investissement soutenu afin de lever les freins à la prise de décision. Cette volonté de se libérer des entraves est un vrai carburant qui se renouvelle sans cesse. En somme, l’engagement appelle l’engagement.
Il est vrai que, de l’extérieur, on pourrait croire que l’influence des élus est relativement faible de telle sorte que l’engagement serait vain et dépourvu d’intérêt. De fait, les candidats à l’engagement pourraient se trouver découragés de fréquenter les Ordres.
Que chacun soit ici rassuré. Les institutions se chargent d’abord de petites choses invisibles du quotidien. Le rôle des élus est avant tout de faire la courte-échelle à ceux de leurs confrères et consoeurs qui rencontreraient des difficultés. La profession prend ainsi de la hauteur, sans bruit.
En somme, l’engagement appelle l’engagement.
L’engagement se traduit aussi par la poursuite de projets au long cours. La collaboration ou la déontologie ne se sont pas faites en un jour. A chacun d’apporter sa pierre à l’édifice. Ici encore, la construction professionnelle se fait sans artifice, au gré des réflexions et des décisions. Elle est néanmoins essentielle.
Même à l’échelle d’un seul élu, il est possible de peser. Les défenses massives, les job-fair, le mentorat, la réforme de l’école de la défense pénale... Toutes ces mesures sont issues d’initiatives individuelles.
Voici donc pourquoi certains avocats s’engagent et pourquoi cet engagement, parfois imparfait, parfois difficile, n’en est pas moins utile.
Par Julien Brochot, Avocat au barreau de Paris, ancien Membre du Conseil de l‘Ordre